Ombrellino et tintinnabule

Deux nouveaux insignes pour la basilique

La basilique du Sacré-Cœur de Montmartre a reçu au printemps 2025 deux symboles prestigieux de son statut de basilique mineure de l’Église catholique : l’ombrellino papal et le tintinnabule. Placés en l’honneur de part et d’autre du maître-autel, ces insignes ne sont pas de simples ornements ; ils proclament le lien particulier de communion qui unit la basilique au pape, évêque de Rome. Leur bénédiction marque une étape importante dans l’histoire du grand sanctuaire de Montmartre.

Ombrellino
Tintinnabule

L’ombrellino papal — De parasol à symbole

L’ombrellino, également appelé pavillon ou gonfalon, est l’un des plus anciens insignes cérémoniels associés à la présence papale. À l’origine, au début du Moyen Âge, il s’agissait d’un objet pratique : un grand parasol recouvert de soie que l’on portait au-dessus du pape lors de ses apparitions publiques dans les rues de Rome pour le protéger du soleil ou de la pluie.

À la Renaissance, l’ombrellino avait pris une fonction officielle dans les processions papales, porté immédiatement derrière le flabellum (éventail à plumes) du pape et devant la litière papale. Les rayures rouges et dorées alternées de son auvent, couleurs dérivées de l’autorité temporelle papale et issues de l’héraldique du Sénat romain, ont été fixées au XVe siècle. Le cadre en bois, surmonté d’un globe et d’une croix, symbolisait l’autorité papale sur l’Église universelle.

Le statut officiel de « basilique mineure » a été conféré pour la première fois par le pape Pie VI par le bref pontifical Supremus Ille le 27 juin 1783, accordant ainsi la reconnaissance officielle à la basilique Saint-Nicolas-de-Tolentino. Les privilèges coutumiers associés aux basiliques mineures — notamment l’ombrellino et le tintinnabule — ont été rendus normatifs dans les réponses et décrets papaux ultérieurs. Plus tard, la Congrégation pour les rites a publié les normes modernes Domus Dei (1968) et Domus Ecclesiae (1989). Dans les basiliques mineures, l’ombrellino est maintenu entrouvert en permanence, indiquant une disponibilité permanente pour l’arrivée du pape ; lorsque celui-ci se rend sur place, il est ouvert en grand et peut être porté en procession solennelle.

L’ombrellino de Montmartre présente un programme décoratif unique : les panneaux inférieurs arborent les armoiries de tous les papes qui ont joué un rôle important dans la promotion de la dévotion au Sacré-Cœur, à commencer par le bienheureux Pie IX, qui a approuvé le culte du Sacré-Cœur, en passant par Léon XIII, qui a consacré le monde entier au Sacré-Cœur en 1899, jusqu’au pape François.

Armoiries du pape Léon XIII
Armoiries du pape Pie XII
Armoiries du pape François

La partie supérieure est ornée d’un cœur sacré de Jésus brodé, unissant visuellement l’autorité papale à la mission spirituelle de la basilique.

Le tintinnabule — Cloche annonçant le pape

Le tintinnabule est une cloche cérémonielle montée sur un support portable et accordée — comme l’ombrellino — à toutes les basiliques mineures. Son origine remonte aux rues médiévales de Rome : lors des processions papales solennelles, une cloche était sonnée à la tête du cortège pour avertir les fidèles de l’approche du pape, afin que la foule puisse se rassembler pour accueillir le pontife.

Le cadre du tintinnabule, appelé beffroi, porte traditionnellement la tiare papale au-dessus des clés croisées de saint Pierre, rappelant l’autorité que le Christ a confiée à son apôtre et à ses successeurs. Dans une basilique aujourd’hui, le tintinnabule est principalement utilisé pendant la messe papale, porté à l’avant du cortège devant le célébrant.

Le tintinnabule de la basilique du Sacré-Cœur est riche en détails symboliques. Sa base représente, d’un côté, la célèbre mosaïque de la chapelle sainte Marguerite-Marie, illustrant l’apparition du Christ à Paray-le-Monial à la religieuse française dont les visions ont inspiré la dévotion au Sacré-Cœur. Cette image est associée à la silhouette de la basilique elle-même, reliant ainsi l’origine de la dévotion à son expression monumentale à Montmartre. Au revers figure l’inscription latine tirée de la grande fresque du plafond : « Sacratissimo Cordi Jesu, Gallia poenitens et devota » (« Au Sacré-Cœur de Jésus, la France pénitente et dévouée »), un acte national de réparation remontant au vœu fondateur de la basilique après la guerre franco-prussienne. La couronne présente au-dessus du Saint-Sacrement est reproduite au sommet du tintinnabule, entre la cloche elle-même et les clefs de saint Pierre.

Par une coïncidence symboliquement forte de communion avec la papauté, l’ombrellino et le tintinnabule de la Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre ont été bénis le jour même où le nouveau pape Léon XIV célébrait la messe inaugurale de son pontificat.

Bénédiction lors de la messe de 11h du dimanche 18 mai 2025